Il y a quelques années, l’union Européenne créait un cadre pour une pratique qui, elle, est pourtant bien ancienne : le placement de produit; souvent désigné par son anglicisme marketeux “product placement”.
Une définition en images
Pour faire simple, prenons le meilleur exemple du placement de produit contemporain, résumé en un quasi plan séquence … Dans “le monde ne suffit pas” Pierce Brosnan dirige sa BMW série 7 avec son téléphone Sony Ericsson, voiture qui, finalement, terminera sa route dans une vitrine du loueur “Avis”.
En quelques secondes, la production a engrangé plusieurs centaines de milliers de dollars, offrant à trois annonceurs un espace publicitaire ciblé et qui, plus que tout autre, qualifie,valide et certifie les valeurs du produit auprès d’une clientèle cible. La BM est classe, performante et résistante, Sony Ericsson innovant et branché et Avis, on le trouve au bon endroit .
La franchise de l'agent 007 est probablement le meilleur exemple de placement de produit … #marketing #cinéma #publicité Cliquez pour tweeterPas besoin de chercher si flagrant exemple, si frappant, voire caricatural… Plus proches de nous, de notre vie tous les jours, les séries télé ne sont pas en reste. Avez vous remarqué, par exemple, que la cavalerie de Julie Lescaut était souvent carrossée de Peugeot et celle du Commissaire Navarro, embarquée en Citroën.
Contrairement à la publicité « classique », qui se présente comme telle, le placement de produit mise sur l’ignorance du spectateur – puisque celui-ci n’est en principe pas averti qu’il a affaire à de la publicité – pour toucher plus sûrement son inconscient. Très présente dans le monde anglo-saxon, notamment au cinéma, mais encore peu développée en France, cette publicité pernicieuse pourrait y faire vraiment son apparition dans les années à venir, en particulier à la télévision, où elle était interdite depuis 1992 car assimilable à de la publicité clandestine . En effet, un article peu connu de la loi du 5 mars 2009 – celle qui, entre autres dispositions, restreint la présence de la publicité sur les chaînes de la télévision publique française… – permet paradoxalement d’ouvrir la brèche en organisant le retour du placement de produit .
Site Acrimed - mardi 15 septembre 2009
Pourquoi un nouvel engouement ? Si le placement de produit n’est pas neuf, qu’est ce qui explique que l’on en parle plus aujourd’hui qu’hier ?
C’est que la méthode à été fortement décriée des gardes fous avaient notamment,été instaurés pour que le “product placement” soit limité au cinéma et que, en tout cas, les télévisions publiques européennes évitent ainsi la diffusion de ce que certains considèrent comme de la “publicité clandestine”, finalement proche voire parfois assimilée à de véritables messages subliminaux !
Mais, il y a quelques années, les cartes ont été redistribuées; l’Union européenne, dans son souci constant d’uniformisation, à décidé de légiférer, créant ainsi un cadre légal pour le placement de produit. Les effets de cette régulation sont pourtant particulier : comme pour chaque règlement de l’UE, les états doivent traduire et/ou adapter dans leur législation, ce qui a été décidé au niveau européen. Mais si les législations sont alors nationales, les programmes, eux, ne connaissent pas les mêmes frontières.
Ainsi, la France n’a pas autorisé l’injection de placement de produit dans les programmes de flux. On retrouve donc uniquement dans les films et série télé cette technique publicitaire décriée par certains qui l’associent aux méfaits de la publicité clandestine, voire quasi subliminale.
Ces dispositions européennes peuvent également donner naissance à des situations kafkaïennes. Un petit état comme la Belgique connaît ainsi une situation particulière qui doit faire s’arracher les cheveux plus d’un brand manager ou autre Broadcast Buyer d’agence ainsi confronté à une situation ubuesque. Pour rappel, en Belgique, 2 communautés linguistiques qui gèrent les matières relatives à la culture et à l’audiovisuel pour ce qui les concerne. Il y a lieu d’ajouter à ce tableau le taux de pénétration des programmes des télévisions voisines et de langue similaire ( dont TF1,fr2, chaînes de bouquets et autres pour la communauté de langue française). Viennent s’ajouter au tableau la CLT et ses chaînes (RTL-TVI,Plug RTL,club RTL), clairement orientées vers le territoire belge (son centre névralgique est d’ailleurs établi à Bruxelles, à un jet de pierre de la RTBF) sans pour autant relever des règles du Csa des communautés de Belgique car émettant … sous licence luxembourgeoise.
Hormis une distorsion de concurrence pour les régies concernées (RMB pour la RTBF et Ip pour RTL), voilà nos brand manager et Audiovisual Buyer confrontés à trois régimes de product placement différents pour un territoire de 11 millions d’habitants.
Par delà le cadre légal qui peut paraître – dans certains cas particuliers- un tantinet tortueux, c’est l’évolution de la technologie qui peut lui donner un relief tout particulier.
Avec l’avènement de la télévision numérique – c’est ici sa distribution qui nous intéresse – il ne faudra probablement pas attendre longtemps pour que le product placement “s’accouple” avec la télévision interactive. Une interaction peut-être poussée à son paroxysme, mais la prospective que je vais évoquer ici “tient la route” et s’inscrit pleinement dans la convergence contenu/adaptation/technologie que nous connaissons depuis quelques années.
Imaginez donc une émission de décoration aménagement de la maison, avec du placement de produit : le luminaire trucmuche, les chaises bazar, le sofa untel…. Chacun lié à un lien hypertexte clicquable, dans une émission interactive qui se met en pause à chaque fois que le téléspectateur promène l’indicateur de sa souris sur un de ces produits.
Une Info-bulle apparaît alors, affichant des informations basiques sur le produit (marque,dimensions,prix,conditionnement,provenance,…) et, bien évidemment, un “call to action” qui permet au téléspectacheteur de se rendre sur le site ad hoc pour acheter en ligne ce qu’il vient de voir utiliser.
Les questions sous-jacentes sont évidemment nombreuses : quid de la part éditoriale/ publicitaire, de la crédibilité de l’émission, du financement de la production (aux clics ou linéaire) qui peut encourager à dériver vers de la promo… et, surtout, quid du retour et de l’interruption du programme pour le téléspectacheteur ? Ce pourquoi la chaîne préfèrera mettre en place pour “son” téléspectateur, un panier d’achats à valider, lui créer un compte client, dont elle fera la somme pour, en finale, valoriser ses programmes auprès des annonceurs et de leurs agences. Le Iien hyperactif alimentant alors plutôt une sorte de compte “lié à une vitrine….
Mais ça, c’est une autre histoire…